«
Vous m'entendez tous ? Bien. Voici les vestiges du Old Sarum Castle, bâti durant la conquête normande de 1066. Nous nous trouvons ici sur le tertre au centre duquel culminaient le château et la cour intérieure. Au-delà du fossé que nous avons traversé se trouve la cour extérieure. On peut y apercevoir les soubassements de la cathédrale, construite en 1075, agrandie puis démolie dans les années 1220 pour être reconstruite deux miles plus au sud, à Salisbury.
» Avant même la construction de cette place forte au Moyen-Âge, les fouilles archéologiques ont révélé une présence humaine datant de la préhistoire, en l'an 3000 avant Jésus-Christ, faisant de Old Sarum le plus ancien lieu d'établissement humain de tout le pays... »
Arthurus Knox écoutait la guide touristique moldue avec un grand intérêt. Cela faisait plus d'une semaine que le sorcier parcourait de long en large et en travers les quelques 1,350
square miles du comté du Wiltshire, se concentrant plus particulièrement sur les sites néolithiques disséminés entre Salisbury et Avebury. Ses recherches sur l'origine de la magie l'avaient mené dans cette contrée à de multiples reprises, sans qu'il trouvât toutefois le moindre signe d'une source magique passée. Après avoir lu tous les ouvrages sorciers traitant de l'histoire de la Grande-Bretagne, une collègue lui avait jeté la futile remarque d'essayer de se pencher sur l'histoire de la Grande-Bretagne telle qu'elle était traitée par les Moldus. Arthurus avait ri de cette remarque désopilante («
Comme si les Moldus y connaissaient quelque chose en magie ! ») avant de prendre cette histoire très au sérieux.
Il avait alors retracé un parcours de visites du comté via les offices de tourisme, à la fois curieux et dépité des us et coutumes moldus. Son dos le faisait plus souffrir par les nombreuses heures passées dans des
tour buses que durant son aller-retour en Scandinavie à chevaucher un vieux balai d'emprunt, ce qui n'était pas peu dire. Il n'avait pu cacher son hilarité à la découverte qu'une partie de la population moldue avait érigé la magie en véritable religion appelée « wicca ». A côtoyer des gens dépourvus de magie, il avait fini par apprendre que la justification des phénomènes scientifiquement inexplicables passait invariablement par la croyance en un ou plusieurs dieux. D'autres cependant affirmaient avec force détails l'existence d'êtres venus d'ailleurs dans des soucoupes volantes. Arthurus s'était interrogé sur la taille de ces êtres, s'ils en étaient venus à voyager dans des petites assiettes, en se disant qu'il aurait été plus malin de choisir les tasses comme moyens de transport.
«
Maman ! Maman ! Y a l'antenne du monsieur qui vibre ! »
Arthurus se tourna vers le petit Moldu qui le pointait du doigt. Il croisa le regard ahuri de sa mère qu'il gratifia d'un large sourire avec un «
oups ! » d'excuse tout en cachant son Capteur de Dissimulation dans son dos. La mère fronça les sourcils et éloigna son fils, comme si Arthurus avait été un homme de basses fréquentations. Il était pourtant bien loin des quelques illuminés qu'il avait rencontrés jusqu'alors, d'excentriques adeptes du paganisme qui se prenaient pour des magiciens en revêtant des habits aux coupes et couleurs farfelues. Le sorcier avait bien étudié les pratiques moldues avant de se fondre parmi eux, et sa tenue de voyageur était une copie conforme de celle d'un aventurier très célèbre dans la culture moldue du nom d'Indiana Jones.
Il attendit que le groupe de touristes se fût assez éloigné avant de ressortir son Capteur. Celui-ci avait émis d'importantes vibrations lorsqu'il était passé tout près d'une grille à même le sol fermant l'accès à une partie souterraine plongée dans les ténèbres, probablement un puits. Jetant des coups d’œil alentour, Arthurus s'accroupit, sortit sa baguette et murmura : «
Lumos ! » pour éclairer la cavité. De son autre main, il attrapa son Capteur et le passa entre les barreaux. Celui-ci se mit à vibrer de plus en plus intensément.
Ce n'était pas la première fois que le détecteur s'activait pendant son périple. En vérité, il vibrait constamment depuis qu'il était arrivé dans le centre du comté, parfois auprès d'anciens sites comme Stonehenge, d'autres fois en pleine étendue herbeuse sans signe magique apparent. Le sorcier soupçonnait l'existence de quelques vieux tunnels souterrains dont il avait entrepris de noter le tracé par-dessus la carte de son dépliant touristique. Néanmoins, c'était la première fois que le Capteur vibrait aussi fort.
Arthurus fronça les sourcils avec un «
Nox ! » dubitatif. Il déposa ses outils et agrippa la grille entre ses doigts pour la secouer un peu. Elle ne bougea pas d'un pouce, bien fixée comme elle l'était dans la pierre. Il se releva en décidant qu'il retournerait ici dans la nuit pour découvrir quelle sorte de magie s'y dissimulait.
***
«
Bombarda ! » La grille explosa dans la nuit, faisant voler des gravats de métal et de pierre. Arthurus s'assit et engouffra ses jambes dans l'ouverture, attrapa sa lanterne puis se jeta dans le vide. La chute fut plus courte qu'il ne l'avait prévu. Il amortit son arrivée par un sortilège de Coussinage et alluma l'extrémité de sa baguette.
Arthurus avait atterri dans ce qui semblait être une salle circulaire percée de trois ouvertures. Les murs étaient de pierres grossièrement taillées, hermétiquement scellées entre elles par un mortier de chaux. Malgré la chaleur encore persistante du mois de septembre, il y faisait froid comme en hiver.
Le sorcier sortit son Capteur de Dissimulation de son sac. Il le pointa sur chacun des passages avant de rentrer dans celui où les vibrations s'étaient faites plus vives puis pénétra dans un long tunnel. Parvenu à un coude serré, il tourna et ne put réprimer un «
Oh ! » d'exclamation en apercevant une lumière qui filtrait à travers une tapisserie couvrant l'entrée de la prochaine salle. Il se couvrit la bouche d'une main tandis que le son de sa voix se répercutait sur la roche. Une fois sa surprise passée, il éteignit lanterne et baguette et attendit un moment avant d'avancer lentement jusqu'à l'ouverture. Anxieux, il saisit un coin de tapisserie entre son pouce et son index et le releva tout doucement.