Nerveuse… Je me sentais nerveuse. Allait-il venir ? Rien n’était moins sûr. L’attente me procurait un sentiment d’impuissance, de vulnérabilité, je détestais ça. J’étais dans mon élément lors de prises de décision, lorsque j’agissais. Rester immobile me laissait bien trop le temps d’imaginer mille situations catastrophiques, mille scénarios improbables et je bouillonnais intérieurement.
Peut-être qu’il s’est méfié et qu’il ne viendra pas. Tu aurais dû signer.
Si ça se trouve il ne te reconnaîtra pas. Tu ne le connais pas. Pas vraiment.
Et s’il n’avait jamais lu ta lettre ? S’il l’avait délibérément ignorée ? S’il ne l’avait jamais reçue ?
Peut-être que tu t’enfonces dans la gueule du loup. Tu ne sais pas grand-chose de ses convictions.
Qui sait ? Peut-être t’apprête-tu à rencontrer un disciple de Gustav G ?
Je devenais complètement parano, c’en était inquiétant. A chaque fois il me fallait prendre le temps de me rappeler que le monde était vaste, que pour l’instant je m’en sortais relativement bien et qu’il n’y avait pas de raison que ca ne continue pas. Et surtout, me souvenir que j’étais une battante, que je n’allais pas abandonner et que je serais forte, plus forte qu’eux s’il le fallait. Craindre une bande de fanatiques, un vieillard sénile et mon... mari – un terme qui aujourd’hui me débectait – ne ferait que m’affaiblir et les rendre plus dangereux. Après tout l’imagination était la meilleure des armes pour qui savait manipuler celle des autres.
Pour l’heure je me contentais de cacher mon agitation comme je savais si bien le faire. Un visage à la fois confiant et détendu, une posture légèrement nonchalante. Mon éducation de sang-pur et mes années à Durmstrang savaient se révéler utiles lorsqu’il s’agissait d’adopter un masque. Vêtue d’une robe d’été lavande aux épaules dénudées et de mon sac à mains je remplissais parfaitement le rôle de la touriste tentée par une visite de la galerie d’art sorcier londonienne. C’était le lieu où j’avais donné rendez-vous à mon petit cousin Théodore Nott. D’une part parce que c’était l’endroit idéal pour un rencontre discrète mais aussi parce qu’après ces jours de fuite et à me cacher dans la capitale anglaise où j’enchaînais les hôtels, la perspective de pénétrer dans un lieu d’art m’apaisait. J’attendais impatiemment que Théo arrive pour payer mon entrée. Quoique qu’actuellement il était plus honnête de dire que j’espérais qu’il viendrait, et que sa présente absence n’était synonyme que d’un manque de ponctualité.
Lorsque j’avais rédigé cette lettre l’invitant à me rejoindre, ma main avait été guidée par la solitude. Cela faisait des jours que je n’avais pas entamé de réelle conversation, et les miens me manquaient atrocement. Or la seule personne pouvant être qualifiée de proche à Londres portait le nom de Théodore Nott, un parent assez éloigné que je n’avais plus revu depuis mes douze ans. Enfants, nous nous rencontrions plus ou moins régulièrement lors de grandes réunions de famille, sa mère étant une cousine de mon père. J’avais conservé le souvenir d’un garçon avec lequel je m’entendais plutôt bien et avec qui je pouvais faire passer le temps pendant ces grands rassemblements de sang-purs très sérieux et plutôt ennuyeux pour des enfants. Malheureusement, sa mère était morte alors que nous n’avions même pas dix ans et ses présences aux réunions de famille s’étaient espacées jusqu’il n’y assiste plus, perdant contact avec la majeure partie de ses parents maternels, y compris moi.
Après tant d’années passées, je nourrissais l’espoir de trouver son soutient et qu’il ne montre pas d’hostilité. Je savais que pendant la guerre des sorciers de Grande Bretagne les Nott s’étaient rangés du côté des Mangemorts et je ne pouvais pas m’empêcher d’être méfiante mais peut-être je pourrais obtenir quelques informations de la bouche de Théo. S’il venait.
Il viendra.
C’était une certitude dont j’avais besoin, alors que je ne cessais d’être assaillie par les doutes.
Emploi : Médicomage à Sainte-Mangouste / Service des Virus et microbes magiques
CV : 1998 - Obtient son diplôme à Poudlard et part pour l'Ecosse
2003- Devient un médicomage qualifié
2004 - Se spécifie dans la catégorie "Virus magiques"
2005 - Fait son retour en Angleterre
Peindre les souvenirsThéodore Nott & Evangeline NyströmThéo marchait rapidement dans les rues bondées de Londres, en direction de la gallery d'art. Il allait rejoindre une femme mais il ne savait pas de qui il s'agissait. Sûrement une ancienne conquers qui voulait le revoir. Il faisait des tonnes d'hypothèses dans sa tête et celle qui revenait le pus souvent était Olivia. Pourtant le jeune homme n'avait vraiment pas envie de la revoir, il avait déjà assez de problèmes entre son père, sa tante et Pansy, surtout depuis que Gemma semblait être venue s'ajouter au lot. Il souffla, il était en retard, comme d'habitude, et le mois de juin commençait ose faire sentir, puisque la chaleur de la ville rendait l'air pesant.
Même s'il avait fait l'hypothèse de ancienne conquête, il ne s'agissait peut-être pas de ça. L'écriture soignée de la lettre faisait penser à une femme, sans aucun doute, mais certains hommes écrivaient très bien. Il devait avouer qu'il avait été très intrigué par le contenu du hibou qu'il avait reçu quelques jours auparavant, c'était d'ailleurs la seule raison pour laquelle il avait accepté ce rendez-vous à l'aveugle. Une fois à l'intérieur de la galerie, il regarda autour de lui. Quelques couples de personnes âgées faisaient la queue pour prendre leurs tickets, un petit garçon pleurait dans sa poussette tandis que sa mère, gênée, essayait de le calmer par tous les moyens. Mais ce qu'il cherchait c'était une personne de son âge, à peine plus vieille peut-être. C'est alors qu'il remarqua une jeune femme de dos, qui portait une robe lavande qui la mettait parfaitement en valeur. Il ne put réprimer un sourire presque carnassier. Après tout, elle était peut-être son rendez-vous puisque de son côté aussi elle semblait attendre quelqu'un. Il s'approcha d'un pas determiné vers elle. Lorsqu'elle se tourna vers la porte, comme pour voir si quelqu'un arrivait, il s'arrêta net. Ce visage lui était bien trop familier.
- Evangeline ? demanda-t-il avec une voix peu assurée.
L’attente… Je n’avais jamais été particulièrement connue pour ma patience. Le léger martèlement des aiguilles de ma montre, un vieux modèle ayant appartenu à mon père et que je ne quittais plus depuis années, résonnait dans mes oreilles, comme amplifié. Tempus fugit. Les secondes et maintenant les minutes s’écoulaient bien trop rapidement, mais ce n’était rien comparé à laquelle mon cœur tambourinait dans ma poitrine. L’angoisse la peur l’effroi. Tout cela s’insufflait en moi pour créer ce rythme endiablé, cette musique infernale dans mes entrailles. Je me forçai à me détendre, à faire redescendre mon rythme cardiaque. L’attente aurait dû me procurer un sentiment de puissance. Pour la première fois depuis des jours je n’étais plus poursuivie par les évènements, j’étais maîtresse de la situation.
Je devais me reprendre en main. Une Nyström doublée d’une Starkov n’était pas submergée par ses sentiments. Elle devait savoir se relever et contre-attaquer. Se venger. Et j’avais besoin de mon petit cousin. Besoin de soutien et d’un peu de chaleur. Même de la part d’une très vieille connaissance. Je connaissais la solitude, cette vieille amie, je l’avais pendant une longue période éprouvée et acceptée. Puis la vie de famille avait fait son entrée, m’avait déstabilisée, m’avait ôté tous mes repères pour m’en créer des nouveaux. Et ainsi la solitude me pesait. Ma fille me manquait, le mari que je pensais avoir me manquait. Alors j’étais prête à me relever, mais je désirer simplement le temps d’un instant trouver une épaule sur laquelle me reposer. Si tant est que l’épaule décide un jour à se montrer.
L’impatience me fit claquer la langue, une vieille habitude embarrassante dont il était difficile de se débarrasser. Mais alors que je me retournai pour la énième fois vers le portillon d’entrée de la galerie, mon agacement dépassant presque mon inquiétude, une paire d’yeux bruns s’accrocha à mon regard. Je vis arriver vers moi un jeune homme dégageant une aura d’assurance et de puissance, au physique soigné cachant le moindre défaut. Ce menton légèrement relevé était sans nul doute celui d’un sang-pur, sa démarche avait quelque chose de presque… séductrice. Cet homme n’avait rien à voir avec le souvenir du garçon maigrichon et maladroit que je conservais, et à la fois tout à voir. La famille ne s’oubliait pas, et Théodore Nott composait la mienne. J’assistai à la métamorphose du visage séduisant de mon petit cousin lorsque son regard m’eut balayée de haut en bas, la confiance et la légère nonchalance laissant place à une expression de perplexité. Le charme semblait s’être rompu, le masque fracturé. Mon visage se plia en un discret sourire, j’étais parvenue à surprendre Nott. Un seul mot franchit ses lèvres, dénué de toute cette assurance finalement factice:
-Evangeline ?
Un frémissement me parcourut, il y avait des jours que personne n’avait prononcé ce nom, que je m’étais oubliée dans la masse. Pour un peu je l’aurais serré dans les bras. Toutefois je n’avais pas été élevée ainsi, une Nyström devait savoir rester digne en toutes circonstances, et surtout dans un lieu public.
-Bonjourr Théodorre, lâchai-je avec douceur, je suis désolée de ne pas t’avoirr prrévenu plus explicitement de ma venue.
La pression retombait doucement, et à nouveau je respirais. Je n’étais plus seule. Cependant, je ne pouvais pas encore savoir si je pouvais me fier à Théo. J’allais devoir jouer finement.
-Je t’attendais pour payer notrre entrrée, assénai-je.
Et je me dirigeai vers le comptoir sans daigner me retourner pour voir s’il m’avait suivie.