Journée noire et pluie épaisse. Les gouttelette tambourinaient violemment contre les carreaux de son unique fenêtre. L'humidité suintait jusqu’à l'intérieur, l'étanchéité de son studio était assez relative. Le propriétaire ne s’embarrassait pas de faire trop souvent des travaux ou rénovations. Même jamais, à vrai dire, depuis qu'elle avait emménagé là quelques années plus tôt.
Elle avait eu besoin d'un logement en urgence et peu cher. Quelques nuits s'étaient faîtes dans la rue, dissimulée dans l'ombre, mais elle avait détesté ça et avait vite voulu trouver un toit. Plusieurs de ses amis aurait pu l'héberger, mais elle ne voulait pas se sentir dépendante d'eux ni les voir encore. Elle avait eu besoin de distance, se détacher de tout ce qu'elle connaissait. Elle avait trouvé ce studio miteux. Même si ce n'était pas toujours des plus simples, elle avait appris à faire avec.
Assise sur son lit, un matelas posé à même le sol, elle observait sa demeure. Elle était contre le mur du fond, intelligemment placée sous la lucarne. C'était stupide de dormir ici, mais au moins, elle avait de la clarté. Juste à côté d'elle, contre le coin de la pièce et sur toute la longueur de son couchage, presque collée à celui-ci, se trouvait une imposante étagère qui lui servait à entreposer livres, documents et bibelots en tous genres. Dans la continuité était installée une table de bois toujours contre les parois de l'appartement. Elle y mangeait, travaillait, ou tout ce pour quoi elle avait besoin de se concentrer. Quelques tabourets l'entouraient ainsi qu'un confortable fauteuil mauve.
Face à cet espace, la cuisine avait été installée. Elle était encadrée par deux portes, l'une étant l'entrée et l'autre menant à sa misérable salle de bain. Un carrelage plus brisé que lisse et une douche qui ne faisait parvenir que de l'eau froide, son état était déplorable. Si elle pouvait l'éviter, elle s'y rendait aussi peu que possible. Elle préférait même ne pas penser à cette pièce tant elle la trouvait pitoyable.
Les murs du studio étaient ornées de multiples œuvres qu'elle créait quand elle s'improvisait artiste. Les tableaux étaient colorés, plutôt abstraits si on considérait que c'était plus des élans fleurissant que tout autre chose. Parfois, il y avait un élément central qui se trouvait être un visage qu'elle réalisait toujours de manières assez réaliste. Sans s'en rendre compte, elle tentait de matérialiser ses démons pour extérioriser.
Au sol, un large tapis jaune fade couvrait presque toute la surface. Cela lui permettait de dissimuler le parquet gondolé et inégal. Elle posa le pieds sur celui-ci, se levant.
C'était petit, rebutant, confiné. C'était mal placé, mal agencé, mal entretenu. C'était insalubre, inhabitable, intolérable. C'était chez elle et elle avait appris à s'y sentir bien.