Le miroir du Riséd. Andrew l’avait reconnu que ses yeux s’étaient posés sur lui. L’impressionnant cadre doré et l’inscription « riséd elrue octnot edsi amega siv notsap ert nomen ej » ne pouvait le tromper. Le sorcier se souvenait avoir trouvé la signification de ces mots lors de son premier cours d’étude des runes en guise d’introduction, en troisième année à Poudlard. Un vieux souvenir qu’il gardait pourtant toujours en tête. D’autant plus que Moriarty avait appris par la suite que l’artéfact contribuait alors à la protection de la pierre philosophale au sein même de l’école. Et voilà maintenant que ce miroir se trouvait juste devant lui, Andrew devait bien admettre se sentir intimidé face à un objet qui dégageait une telle aura de mystère.

Le langue-de-plomb connaissait évidemment sa réputation. La glace était de capable de refléter les rêves les plus fous, les plus enfouis de ceux qui venaient s’y contempler. Le sorcier était assez dubitatif à l’idée d’observer l’image que lui offrirait le miroir. En vérité, il n’y avait rien que désirât Andrew Moriarty. Il menait certes une vie de solitaire, mais n’était-ce pas la meilleure situation dans ce monde où les Hommes étaient affreusement… humains ? Il y avait longtemps que le brun avait cessé d’essayer de comprendre les gens qui l’entouraient, longtemps que son sommeil était sans rêve. Jamais il ne s’était égaré à vouloir des choses impossibles. Avec l’envie de rire, Andrew fut tenté de s’avancer pour défier le miroir. Que pourrait-il bien refléter face au cœur vide du langue-de-plomb ? Peut-être se contenterait-il de lui montrer sa silhouette telle qu’elle était.

Alors Andrew se plaça face à la glace et attendit. Il constata avec une once de déception qu’il ne voyait rien d’autre que son propre reflet… Ainsi donc le miroir du Riséd semblait avoir atteint ses limites. Mais sur la glace, son double s’activait indépendamment du véritable Andrew qui fronça les sourcils, perturbé. Le reflet arborait un magnifique sourire, sincère, à la différence du rictus faux habituel du brun. Et puis l’instant d’après, des larmes dévalaient les joues du visage qui se tordait sous l’effet de la douleur et de la peine. Le langue-de-plomb recula d’un pas. Qu’est-ce que tout cela signifiait ? Le reflet retrouva une figure sereine et ses larmes semblèrent sécher. A présent il avait l’air simplement heureux et apaisé. Une deuxième silhouette apparut soudainement dans le miroir. Ses traits étaient floutés mais elle était indéniablement féminine. Elle embrassa furtivement le reflet d’Andrew, telle une ombre avant de disparaître et celui-ci était à présent rayonnant.

De l’autre côté du miroir, le sorcier était blême. Il ne comprenait l’image que renvoyait la glace, ou du moins il ne voulait pas le comprendre. Mais impossible de faire taire la voix sournoise qui résonnait dans son esprit.

« Tu désires ressentir des émotions comme chaque humain. Tu veux aimer et être aimé. Mais tu sais très bien que tu en es incapable. Tu n’es qu’une coquille vide. »

Les sentiments… depuis qu’il était enfant Moriarty n’avait jamais su les percevoir et saisir ce qu’ils étaient vraiment, ils étaient restés inconnus pour lui et ça n’avait pas changé. Pour la première fois depuis bien longtemps, Andrew se sentait désarmé et faible face à ce misérable miroir. Il tentait en vain de refouler une vérité qu’il passait son temps à refouler en vain et qui ressurgissait toujours au pire moment. Et il semblait qu’il ne serait jamais prêt à l’accepter. Alors il se détourna brutalement sans le moindre regard et sortit de la pièce tête baissée. Pourtant la vérité était bien là. Il manquerait toujours un rouage à la machine.