La neige craque sous tes pas tandis que tu remontes l’allée qui mène vers la grande demeure. Tu ne viens qu’une fois par an, à la date anniversaire, et la nature a repris ses droits sur le terrain. En été, le parc doit ressembler à une forêt vierge avec ses herbes folles et la pièce d’eau qui n’est plus entretenue. Au début, l’idée te pinçait le cœur, mais finalement, c’est ce qui peut arriver de mieux à cet endroit : qu’il se transforme en sanctuaire inviolé.
À mesure que tu avances, ton apparence change. Tes cheveux s’éclaircissent jusqu’à devenir blonds, les traits de ton visage se modifient légèrement jusqu’à reprendre leur apparence première – une apparence qui te surprend maintenant quand tu la croises dans un miroir, les rares fois où cela arrive. Mais Matveï est mort depuis huit ans et, peu importe de quoi sera faite ta vie, tu n’es pas sûr de le ressusciter. Ta survie n’est qu’une aberration.
Un dernier tournant. L’allée débouche sur… le vide. Un instant, pourtant, tu as cru que la silhouette du manoir se dressait encore là ; tes yeux ont recréé l’image si familière qui n’est plus qu’une illusion. De la fière demeure, il ne reste qu’un immense cercle noir, à peine recouvert par la neige, même à présent. Brûlée jusqu’aux fondations, brûlée jusqu’à ce qu’il n’en reste pas pierre sur pierre, jusqu’à ce que la chaleur les fasse toutes éclater et les réduise en cendres. Les flammes dansent dans ton esprit ; ton cœur accélère et tu trembles sans pouvoir t’en empêcher, le corps tout entier saisi d’un frémissement incontrôlable, comme les légères secousses qui précèdent un tremblement de terre dévastateur. Tu serres tes poings enfouis dans tes poches, le regard fixé sur les restes de ta maison, de ton foyer. Sur les restes des tiens. Tu sais où se trouve le mausolée que ta tante a fait dresser à peu de distance, tu sais qu’elle a fait graver dessus les noms de tes parents et de ta fratrie. Tu sais aussi qu’aucun cercueil n’accueille leurs corps. Le Feudeymon les a réduits en cendres, comme la demeure, fine poussière dispersée par les vents d’hiver.
C’est pourtant vers le mausolée que tu te diriges bientôt, incapable de supporter plus longtemps la vue des lieux. Tu te fraies un chemin dans la poudreuse, longes le lac gelé où tu crois entendre les rires et les cris d’Anastasia et de Nicholas tandis qu’ils patinent à toute vitesse. Bientôt le monument de marbre blanc apparaît entre deux arbres, presque invisible entre le ciel gris et la neige. Les quatre noms se détachent. Maksim et Ariana – ta tante l’aurait bien écartée, si elle n’avait fait passer la famille au-dessus de ses convictions. Anastasia et Nicholas. Bien trop jeunes, tous les quatre, pour se retrouver ici. Et le tien aussi, évidemment, pour parfaire l'illusion. D'un certain côté, c'est vrai, le Matveï que tu étais repose ici aussi.
— Tu n’avais pas dix ans, Nick…
À côté de toi, la petite silhouette de Nicholas hoche la tête en silence, les yeux emplis d’une tristesse infinie. Et c’est trop pour toi, trop, tous ces noms, tous ces souvenirs qui remontent et éclatent, issus d’un temps révolu… Les larmes coulent sur tes joues, tandis que tu tombes à genoux dans la neige. La main de ton petit frère glisse sur ta joue – à moins que ce ne soit qu’une brise, tu sais qu’il n’est pas là, même s’il t’apparaît de temps en temps. Tu ne peux pas le regarder en face, pas maintenant, pas ici, pas alors que tu l’as trahi, que tu l’as laissé mourir… *
Rien ne prédestinait ton père, héritier d’une importante famille de sang-pur russe, à s’installer en Angleterre dans les années 1970, alors qu’il avait à peine plus de vingt ans et accomplissait une mission dans la plus pure tradition familiale. Rien si ce n’est l’impensable dans une famille aussi rigoriste et traditionnelle que la sienne, dans un pays qui porte aux nues les valeurs des sang-pur : épouser une née-moldue.
Et il fallait bien quelqu’un comme Ariana pour faire craquer ton père. Sûre d’elle, à l’aise partout et surtout, surtout historienne de la magie. Tu n’as jamais très bien su comment ils se sont rencontrés exactement ; leur façon de raconter l’histoire changeait à chaque fois. Dans un tombeau magique perdu, au milieu des enchantements des pyramides d’Egypte, dans les vieilles bibliothèques anglaises, à Edimbourg comme à Stonehenge… peu importait au fond : ils avaient les mêmes ambitions, le même caractère enflammé, la même passion pour le danger et l’illégalité – quelque part, ce n’est pas si surprenant qu’ils aient péri dans les flammes, rien d’autre ne leur convenait, même si tu aurais voulu que cela arrive bien plus tard. Et pas chez eux, un soir de Noël.
Dès le départ, leur union a attiré les mauvais regards, même si ton père a gardé une bonne partie de son aura de chasseurs de trésor officieux. Les sang-pur avaient trop besoin de lui pour enrichir leurs collections et se voler les uns les autres. Du côté russe, ta tante, sa sœur, Alevtina, est la seule à être venue, même si elle désapprouvait. La seule à avoir gardé contact aussi et à continuer d’assister ton père dans ses missions – à ton avis, elle s’amusait beaucoup trop avec lui pour laisser les lois des sang-pur détruire leur relation. Et s’il fallait pour cela accepter Ariana, puis Anastasia, toi, Matveï, et Nicholas enfin… elle pouvait s’y résoudre. Mais le drame rôdait.
*
Tu n’es pas encore né, l’année 1981 commence, les Mangemorts sont au sommet de leur puissance et nul ne parvient encore à les défaire. Voldemort a déjà tenté de rallier ton père à lui. Mais s’il s’y connaît en magie noire et peut être d’une grande aide au Mage noir, Maksim ne compte pas tourner le dos à sa famille. Ariana reste l’amour de sa vie, Anastasia va sur ses trois ans.
Est-ce qu’ils auraient pu éviter ce qui s’est passé ce soir-là ? Tu ne le sais pas, eux non plus. Ta mère est tombée dans une embuscade tendue par les Mangemorts. Seule contre eux, elle a réussi à tenir jusqu’à l’arrivée de ton père, mais n’a pu éviter de recevoir un trop-plein de sortilèges qui l’ont conduite à Sainte-Mangouste. De l’avis général, elle a eu de la chance de s’en sortir et de ne pas faire une fausse couche. Mais les vraies conséquences, on ne les a découvertes qu’à ta naissance au mois d’août 1981.
Première surprise, sans lien avec l’attaque, tu es venu au monde avec les cheveux bleus. Métamorphomage. Capacité rare, mais qui a tout de suite amusé tes parents – et peut-être qu’ils voyaient déjà comment elle leur servirait. Même si à ce moment-là, c’était surtout la joie qui l’emportait. Matveï Maksimovitch – un nom russe comme le voulait ton père, c’est ton petit frère qui a eu le droit au nom anglais, tandis qu’Anastasia se vantait d’avoir un prénom commun aux deux pays.
Deuxième surprise, tu as très vite commencé à pleurer et à être malade. Et les sorts d’examen et de soin des médicomages ont empiré les choses – ils ont fini par comprendre. Les sortilèges des Mangemorts avaient détraqué ton pouvoir naissant : ton corps avait absorbé une partie du choc magique, mais n’avait pu s’en débarrasser. Or, les humains ne sont pas réellement des créatures magiques ; au-delà d’un certain seuil, la magie pouvait se retourner contre eux. Avec l’énergie reçue en trop, ton corps se retrouvait de fait dangereusement proche de sa limite, et le moindre trop plein provoquerait des malaises comme ceux provoqués par les sorts pourtant légers des médicomages. Comme ils l’apprirent à tes parents, sous le choc, cela signifiait que tu ne pouvais pas te trouver dans un endroit où trop de personnes utilisaient la magie en même temps ou que, si tu recevais un sortilège, les conséquences iraient au-delà de l’effet du maléfice. Il ne fallait pas non plus que tu en lances trop – et en attendant d’avoir ta baguette pour te canaliser, il faudrait faire attention à tes manifestations magiques d’enfant. À ce stade, tes parents perdirent le fil de l’énumération, ils te voyaient déjà condamné à une vie de Cracmol, sans magie, lorsque les médicomages leur apprirent enfin quelque chose de positif : il leur était difficile de cerner avec précision l’importance de ton handicap magique, tout cela s’affinerait à mesure que tu grandirais. Quoi qu’il en fût, leurs mines lugubres convainquirent tes parents de tout faire pour que tu mènes une vie semblable à celle de ta sœur. Ils ne comptaient pas te couver, ni te placer sous une bulle loin de toute magie. Ils verraient les précautions à prendre et, si, finalement, la magie se révélait trop dangereuse pour toi, ta mère mettrait à profit ses connaissances du monde moldu. Pas de problème, que des solutions, ça aurait pu être une de leurs devises. Et tu n’aurais pas pu mieux demander.
*
Tu as six ans et tu entres dans l’atelier de ton père sur la pointe des pieds pour le regarder travailler, penché sur son établi, en train de préparer tu ne sais quelle potion ou d’ensorceler un autre objet. Pour une fois, il n’est pas à l’étranger – non que ça te dérange, mais tu aimerais qu’il t’emmène, comme il a déjà commencé à emmener Anastasia. Et les récits de ton aînée ne font qu’ajouter à la gloire familiale, même si tu te demandes souvent à quel point elle dit la vérité. Ta tante et ta mère se contentent d’un sourire énigmatique, en te disant que tu verras bien quand tu y seras. Et tu as hâte, oui, tu as hâte d’écrire à ton tour ta page d’aventures, comme tous les Orlov qui t’ont précédé – même si une partie d’entre eux n’ont pas l’air très fréquentables, tu ne comprends pas pourquoi ils ne veulent pas voir ta mère qui est aussi géniale que ton père, ils ne veulent pas vous voir non plus, Ania et toi, trop proches du sang moldu comme ils disent. Tant pis, tu t’en moques. Tu as déjà la tête emplie de leurs histoires, des récits qu’on dirait sortis d’un roman, et de fait, en écoutant tes parents, il n’y a guère besoin d’autre conte pour s’évader. Mais il y a aussi toutes les activités dont on a commencé à te parler et que tu ne comprends pas encore très bien, cette voie un peu particulière empruntée par ta famille. Au lieu de la politique comme la plupart des dynasties, elle a préféré se spécialiser dans les potions et l’archéologie – comprendre : le trafic de potions pas toutes très légales et les objets magiques, qu’ils soient à ensorceler ou à découvrir dans les vieilles maisons ou dans les tombeaux. On ne compte plus les bijoux enchantés par ta famille, dans un but offensif ou défensif, les poignards et les bagues enduits de poisons concoctés par elle et les trésors découverts tant dans les pyramides que dans les tombeaux. Une famille à la Indiana Jones, le crime en plus, diraient les Moldus. Efficacité et qualité garanties.
À côté de cela, tu continues tes explorations personnelles : les potions ne sont pas un danger pour toi, tu en es secrètement soulagé. Tu t’entraînes également à maîtriser ton don de métamorphomage : tu n’aimes rien tant que prendre l’apparence de ta grande sœur, elle s’est déjà retrouvée punie à ta place pour des bêtises que tu avais commises – elle s’en est vengée par la suite, mais cela valait bien les fous rires que tu t’es pris devant son air outragé.
*
Tu as huit ans, et Anastasia en a onze, elle va entrer à Poudlard, Nicholas vous rejoint. Mais pour l’instant, vous continuez de vous entraîner durement l’un et l’autre, l’un contre l’autre ou ensemble contre votre père ou votre tante. Tout est prétexte à progresser. Maniement des lames, art martial issu du systema russe, les heures passées à répéter et travailler chaque mouvement, jusqu’à atteindre fluidité et force, souplesse et précision. Tout cela n’est encore qu’un jeu pour toi, tes parents et ta tante te présentent les choses ainsi. Un jeu dont tu pourras devenir le héros. Et vous vous remettez en place, l’un en face de l’autre, le souffle court, trempés de sueur, guettant le moindre mouvement de l’adversaire. Anastasia et ses tentatives d’user de sa force, tandis que toi, tu mets à profit ta petite taille pour retourner son énergie contre elle. Les coups presque portés – ta sœur emportée par son élan, toi qui la mets à terre, genou sur son torse, coup de poing ou de lame dans les côtes, arrêté à un cheveu de sa peau, même si tu sais comment frapper pour de bon. Sourire victorieux, jusqu’à ce que ce soit elle qui te mette à terre – c’est ce qui arrive le plus souvent. Vous êtes sans cesse obligés de vous réinventer, d’imaginer de nouvelles tactiques pour que l’autre ne prenne pas l’avantage.
Et il y a tous les autres jeux inventés dans la salle spéciale du manoir, celle où vous affrontez pièges et sortilèges mis en place par les grands à votre intention, inspirés de ceux qu’ils ont eux-mêmes affrontés. Agilité, vitesse, endurance. Tu te demandes toujours ce qu’ils vont vous trouver et tu n’es jamais déçu. Tu imagines le monde comme un immense terrain de jeux, et tu as hâte de le parcourir pour de bon. Tes parents t’emmènent parfois à l’étranger pour que tu commences à t’imprégner des ambiances des autres pays, tu découvres l’Asie, l’Afrique, l’Amérique latine, un peu le reste de l’Europe, mais jamais tu ne les accompagnes dans leurs véritables expéditions, là où il y a tous les dangers. Tu dois te résoudre à les attendre pendant qu’eux vivent les vraies aventures, tu en es réduit à imaginer les pièges qu’ils affrontent, les sorciers qu’ils combattent, la façon dont ils ramènent tous ces objets.
Et il y a tous les moments de détente et de jeux, les vrais ceux-là, comme quand Anastasia et toi faites la course en patin sur le lac gelé, que vous volez sur vos balais – tant que tu ne restes pas trop longtemps dessus, ça passe, mais la nausée finit toujours par venir, et si tu traînes trop, les saignements commencent – ou quand tu t’étends sur le dos dans l’herbe ou que tu t’assois sur le toit, l’été, pour observer les étoiles en rêvant d’être un aigle, de t’envoler dans ces espaces…
*
Tu as dix ans, bientôt onze. Tu te prépares à ton entrée à Poudlard avec un mélange d’excitation et de scepticisme. Ce qu’Anastasia t’a dit ne t’emballe pas des masses. Explorer le château et ses recoins, découvrir les passages secrets, les salles cachées, les objets perdus ou dissimulés, cent fois oui ! Mais rester assis toute la journée sur une chaise à écouter des professeurs alors qu’il y a tant à observer dans l’atelier de ton père, tu connais déjà certains poisons, d’autres potions, tu veux continuer à t’entraîner, à te battre… Ta mère te prend à l’écart pour t’expliquer en quoi c’est important d’aller à l’école, pour te faire des amis, pour apprendre la même magie que les autres, mais aussi commencer à fréquenter ceux qui seront tes clients dans le futur. Tu n’en as toujours pas très envie, mais tu acceptes parce que tes parents le veulent. Et comme ils te le répètent, c’est un test pour le moment, Dumbledore est au courant de ton souci, il fera ce qu’il peut pour te soulager, étudier la façon dont tu t’adaptes à la magie. Et puis, il y aura Anastasia, Anastasia avec qui tu pourras continuer à t’entraîner.
Ta baguette, offerte par ton père, venue de ta famille russe, te réconcilie en partie avec l'idée de l'école - une belle baguette en bois de sapin, le bois des survivants. À l'époque, tu as pris cela comme une superstition, mais aujourd'hui, tu aurais voulu que toute ta famille en ait... Et une plume de jar-ptitsa à l'intérieur, l'oiselle de feu des contes slaves. Une alliance redoutable. Tu as hâte de l'essayer pour de bon.
*
Comme on pouvait s’en douter, ta scolarité a été plus que chaotique. Tu n’es resté là-bas que par esprit de contradiction, parce que partir aurait été un aveu de faiblesse, un signe d’échec et que tu ne l’aurais pas supporté. Tu es un sorcier comme un autre, quoi qu’ils en disent, quoi qu’ils pensent, et tu le leur prouveras.
Tu as rejoint les Gryffondor, le clan des Lions, ravi de te retrouver dans la même maison qu’Harry Potter qui a un an de plus que toi. Ta sœur y est aussi, déjà en quatrième année. Si le début se passe bien, ça se complique au fil des ans, à mesure que les sortilèges gagnent en puissance et en complexité – au point que lorsque la classe s’entraîne à lancer collectivement un sortilège, toi, tu te retrouves à lutter contre la nausée et à juguler tes saignements de nez. Au point que les professeurs t’autorisent à quitter les cours pratiques pour t’entraîner de ton côté. Mais là aussi, tu dois faire attention. Trop de sorts lancés à un intervalle rapproché, et le résultat est le même.
Dans les couloirs, tu endures les moqueries sur tes capacités. Alors, tu continues de t’entraîner encore et encore, dans l’espoir de reculer tes limites. Tu t’endurcis, sans parvenir à éradiquer ta faiblesse. Tes amis te soutiennent, mais tu as aussi besoin de moments seul dans l’immensité du château.
En plus, à côté des aventures vécues à l’étranger avec tes parents, l’école garde un air trop sage, trop restrictif. Tu envisages souvent de partir, mais tes parents se partagent entre Nicholas et les voyages. Tu pourrais le garder, l’entraîner, mais ils refusent. En conséquence, passé par une phase où tu n’as plus rien fichu dans la plupart des cours – seules les potions et l’histoire de la magie trouvent encore grâce à tes yeux, Rogue est détestable, mais il est excellent comme maître des potions et tu ne lui en demandes pas plus –, ton esprit inventif a trouvé de quoi s’épanouir et tu as multiplié les bêtises, sans atteindre le niveau des jumeaux Weasley.
Faut-il parler de ces nuits où tu t’es hissé sur les toits de l’école pour « avoir une meilleure vue » ? Ou de tes explorations dans la Forêt interdite ? De tes bagarres avec les autres élèves ? De la fois où tu as voulu élever une acromentule pour faire du commerce d’œufs ? Ou de tous les autres petits trafics que tu as gérés au sein de Poudlard, capable de fournir aux élèves absolument tout ce qu’ils te demandaient, des substances interdites aux moyens de tricher pendant leurs examens ? À partir de ta troisième année, même les plus âgés savaient auprès de qui se fournir. Efficacité et qualité garanties, comme toujours. Un Orlov ne s’abaisserait pas à vendre de la mauvaise marchandise. Insupportable, charmeur, toujours partant pour des bêtises ou des infractions au règlement, tu dois occuper un bon espace chez Rusard. C’est peut-être vrai, tu n’as jamais vérifié, et Nicholas n’a pas eu le temps de s’introduire dans son bureau…
La situation commence cependant à se gâter après ta quatrième année. Toi, tu crois les rumeurs rapportés par Harry Potter, Dumbledore y accorde foi aussi, de même que tes parents. Pendant les vacances, tu perçois leurs regards inquiets, même s’ils font illusion devant Nicholas. Du haut de ses sept ans, ton frère a hâte de vous rejoindre. Toi, tu rêves de plus en plus de t’envoler. Tu t’ennuies, tu étouffes dans ces épais murs de pierre, tu veux parcourir le monde, plutôt que de mourir à petit feu dans ces études qui ne te passionnent pas. Tes parents t’encouragent à passer au moins tes BUSE. Tu acceptes. Ensuite, hors de question de passer les ASPIC. Tes parents te formeront.
Et puis, tu passeras du temps avec Nicholas, vous avez hâte tous les deux, Ania continue ses études à Londres et toi, tu es loin les trois quarts de l’année.
*
Le sourire qui se dessine sur les lèvres de ton petit frère à côté de toi est empli de nostalgie, et malgré les larmes, tu ne peux t’empêcher de le lui rendre. Tu avais une tendresse toute particulière pour ton cadet, même si tu t’entendais à merveille avec Anastasia, qui t’a si souvent défendu à Poudlard.*
Tu as quinze ans. L’année de tes BUSE est aussi celle qui voit la montée en puissance des Mangemorts, bien que le Ministère soit à présent au courant du retour de Voldemort. Tes parents s’inquiètent, tu as surpris des conversations : les adeptes du Mage noir sont toujours intéressés par les travaux de ton père, mais il leur tient tête. Toi, tu es en sécurité à Poudlard, malgré les événements qui se déroulent.
Jusqu’à la fin de l’année.
Jusqu’à la mort de Dumbledore.
La chute du Ministère de la magie l’été qui suit n’en est que la conséquence inéluctable. Tes parents renforcent les défenses du manoir et t’interdisent de retourner à Poudlard – tu n’en avais pas l’intention de toute façon. L’Ordre du Phénix se redéploie, tes parents rejoignent discrètement la résistance qui s’organise. La traque des nés-moldus inquiète particulièrement ton père ; ta mère refuse de se présenter au Ministère et elle fait bien.
Leurs missions à l’étranger se raréfient, ils veulent rester près de Nicholas et toi. Ton père et ta tante continuent évidemment de vous entraîner aux arts martiaux comme à vous battre avec une lame – et maintenant, ils n’ont pas toujours l’avantage. Ça fait longtemps que tu as compris à quoi servent ces leçons, le véritable but de ces jeux qui t’amusaient, enfant. Pendant des années, ils vous ont appris à frapper, peut-être à tuer, sans réfléchir, sans hésiter. Ils te forment également, ils ont récupéré les cours de sixième année d’Anastasia, continuent de t’entraîner aux sortilèges en veillant à ne pas t’épuiser – si tu peux arriver à résister un peu plus aux assauts, ce sera toujours ça de gagné.
Tu rêves encore de fouiller des ruines avec eux, de rencontrer leurs contacts aux quatre coins du monde, de t’immerger dans leurs préparations et dans leurs commerces d’objets interdits. En plus, ton don leur sera bien utile. Quoi de mieux que d’arborer les traits du propriétaire de la maison qu’on cambriole ? Déguisement imparable.
Tu rêves de cette vie parfaite, une fois que la guerre serait terminée.
Évidemment, ça ne pouvait pas durer.
*
Tu as seize ans et ton monde explose et s’effondre. Pourquoi es-tu remonté dans ta chambre ce soir-là ? Vous attendiez ta tante, en retard, contrairement à son habitude. Tu as quitté le salon, laissé tes parents et ton frère et ta sœur derrière toi, tu ne sais plus pourquoi. Tu te dis encore que tu n’aurais pas dû, qu’il aurait mieux valu que tu restes avec eux, que tout se termine pour vous en même temps. Ça aurait été plus simple. Plus facile.
Tu as senti le crépitement de la magie avant tout le monde. Le crépitement et le goût de rouille dans ta bouche. Tu te plies en deux, craches un peu de sang, nauséeux, signe que des sortilèges puissants sont à l’œuvre. Puis la chaleur. Une chaleur ardente, insoutenable, qui s’infiltre dans chaque pièce. Puis les cris – les hurlements, atroces. La terreur qui te noue les entrailles, tandis que tu te rues hors de ta chambre, droit vers l’escalier, droit vers les tiens.
Papa. Maman. Ania. Nick. Dans le couloir, c’est déjà l’enfer. La chaleur ondule en vagues puissantes ; les peintures sur les murs comme les tapisseries sont déjà en train de gondoler, sur le point de s’enflammer. Tu peines à respirer, l’air te brûle les poumons et la gorge, tes yeux semblent se dessécher et se ratatiner dans leurs orbites, malgré le sort d’eau lancé autour de toi. Tu tousses encore et encore, le sang constelle ta main, coule sur ton menton en fins filets. L’escalier, là. La rampe sous ta main. Un cri, alors que tu retires tes doigts brûlés.
— Matveï !
La petite voix aigüe de Nick, emplie d’une terreur folle. Tu te jettes en avant. Juste à temps pour voir ton petit frère encerclé par les flammes, monstres de feu décidés à tuer, à ne rien laisser intact derrière eux. Flammes vivantes, presque, serpents incandescents, chimères, dragons, en train de tout ravager, animés d’une rage sauvage, ravis du carnage. Tout flambe à leur contact, tout explose dans la lumière sanglante qui les entoure. Tu te plies en deux, tu n’as jamais été aussi malade de ta vie, craché autant de sang. Tu t’en fous, ça ne compte pas. Les murs crépitent, se fissurent, parcourus de lézardes et de crevasses tandis que tu te précipites vers ton frère, fiévreux, tremblant. Mais trop tard, mille fois trop tard. Un cri – un hurlement qui t’atteint jusqu’à l’âme. Les flammes lèchent la peau de Nicholas. La dévorent jusqu’aux os. En un instant, il ne reste rien de la petite silhouette, annihilée par les flammes.
Tu restes une seconde sans bouger, le regard fixé sur l’endroit, jusqu’à ce que tes réflexes prennent le dessus lorsque tu aperçois un rapace de braise en train de te foncer dessus, les ailes battantes projetant des étincelles de tous les côtés. Tu ne peux plus descendre, tu ne peux que remonter. Ce que tu fais en courant.
L’escalier ondule sous tes pas, craque et vibre. Le mur de chaleur dans ton dos te brûle la peau, tu la sens cloquer et se froisser tandis que tu cours de toutes tes forces, en ignorant la douleur. Plus tard. Plus tard. Il faut que tu sortes d’ici. L’escalier s’écroule derrière toi, le parquet se gondole et se crevasse, chaque pas menace de te renvoyer un étage plus bas, droit dans les flammes. Tu n’y vois plus rien, les fumées brouillent ta vue et t’asphyxient.
Une pièce sur ta gauche, la poignée métallique te brûle la main tandis que tu te rues à l’intérieur, un griffon de feu sur tes pas. La fenêtre, là, volets non fermés. Les flammes tout près, les flammes sur toi, le griffon tente de te happer au moment où tu sautes. Feulement de rage, hurlement de douleur. Tu t’écrases quatre mètres plus bas dans l’épaisse couche de neige.
Douleur. Ténèbres.
Derrière toi, la maison continue de flamber.
*
C’est ta tante qui t’a trouvé, ta tante qui t’a sauvé la vie. Elle qui t’a emmené dans un hôpital magique à l’écart pour soigner tes blessures – le déplacement a failli t’achever, les médicomages ont dû renoncer à leurs sortilèges habituels pour te sauver. Entre les brûlures et l'hémorragie abondante, ta survie n'avait rien de garantie. Mais tu as commencé à lutter. Lutter contre la souffrance atroce qui te ronge le corps, comme si l’incendie brûlait encore, comme si les flammes continuaient de ravager ta peau. Comme si tu y étais encore. Et quelque part, c’est le cas. Le moindre sommeil est empli d’écarlate et de doré, de langues de feu ardentes et avides, qui escaladent les murs, lèchent le plafond, avant de se ruer sur toi, sur le point de te dévorer. Les cris de ta famille, ceux de tes parents, ceux de Nick, surtout, que tu n’as pas pu sauver, évaporé en cendres sous tes yeux, alors que tu lui tendais la main. Nick mort par ta faute. Délires et cauchemars s’entremêlent, se fondent dans la douleur qui efface tout. Et la peur, la terreur de replonger dans ces souffrances, de disparaître dans les tourments.
Lorsque tu commences à émerger des brumes, seule ta tante est là. Elle n’a pas besoin de parler pour que tu saches. Elle est la seule, avec toi. Arrivée juste à temps pour toi, bien trop tard pour les autres. Elle n’a pas besoin de te dire non plus qu’il ne reste rien de ta famille, de ta maison, de ton enfance, des travaux de tes parents.
Rien d’autre que des cendres.
Le bilan des médicomages te passe largement au-dessus de la tête à ce moment-là, perdu comme tu l’es. Ton côté gauche a été brûlé du cou jusqu’à la cuisse ; si les greffes de peau ont pris, tu garderas à jamais les cicatrices, cette peau parcheminée, ridée, semblable à du papier mâché. Tu t’en fous. Ta voix ne s’en remettra pas non plus, condamnée à rester basse et rauque, perpétuellement enrouée. Maintenant encore, c'est le point le plus difficile lorsque tu changes d'apparence. Et si tu pourras te battre, tu ne récupéreras jamais autant de force qu’avant. Tu t’en fous, tu t’en fous, tu t’en fous, ça ne compte pas, c’est rien à côté du reste, de ta vie ravagée, de ta famille brisée, réduite à rien.
Ce n’est que lorsque tu as assez de force pour te lever, au bout de longues semaines d’hospitalisation, que ta tante t’emmène sur les ruines – non, sur le cercle de cendres, la seule trace du manoir. C’est là que tu t’écroules, hoquetant, secoué par les sanglots, la main de ta tante sur ton épaule et dans tes cheveux. Tu es incapable d’accepter le réconfort qu’elle t’offre, tu n’en veux pas, tu aurais dû mourir là, toi aussi, disparaître en cendre, ne pas rester seul.
Les noms tournent et retournent dans ta tête. Tu scelles les lèvres, retiens l’envie de les hurler dans le vent. Ça ne servira à rien, ils ne reviendront pas. Jamais. La main de ta tante se crispe sur ton épaule. Elle lutte contre les larmes. Rien ne transparaît sur son visage lorsque tu relèves les yeux vers elle. Elle ne te laissera plus craquer, tu le sais.
Un mouvement attire ton attention sur ta gauche. Nick. Tu ne peux pas y croire. Mais c’est lui, ce sont ses cheveux noirs, ses yeux, son sourire, même s’il a changé, empli d’une tristesse insondable. Nick. Tu le penses et tu le hurles. Ta tante sursaute. Tu te relèves d’un bond, te précipites vers lui en trébuchant à moitié, en serrant les dents sur tes blessures qui tirent. Nick, Nick, Nick… Mais lorsque tu tentes de le toucher, l’illusion se dissipe. Ne restent que le vent et le goût salé de tes larmes.
Ta tante te regarde avec inquiétude lorsque tu lui racontes que tu as vu ton petit frère. Peu importe qu’elle te croie ou pas, tu n’es pas fou. Juste assez lucide pour savoir que ton esprit te joue des tours. Mais tu es d’accord pour qu’il répète celui-ci – et il ne se prive pas de le faire. La petite ombre de ton frère te suit régulièrement, signe de la culpabilité qui te tord le ventre. Tu aurais pu le sauver, l’attraper, l’entraîner dans ta fuite. Tout faire pour qu’il s’en sorte même s’il était déjà trop tard pour les autres.
Mais après la douleur, il faut comprendre. Ta tante ne te laisse pas sombrer, te soutient, parfois brutalement. Même si vous ne partagez pas les mêmes idées. Selon elle, rien ne serait arrivé sans ta mère et son sang de née-moldue. Malgré ce qu’elle a fait pour toi, ta rage explose contre elle. Depuis quand les victimes sont responsables de ce qui leur arrive ? C’est bien plutôt la faute de gens comme ta tante, avec leur obsession du sang-pur et leurs idéologies nauséabondes ! Et si ça la gêne tant, elle n’a qu’à t’achever ! Pourquoi avoir pris la peine de te sauver ?
Elle l’admet, admet que c’est sa douleur et son chagrin qui la font parler ainsi.
Tu ne peux pas garder ton identité. Les Mangemorts rôdent encore, la guerre n’est pas finie. Aux yeux du monde entier, Matveï Maksimovitch Orlov est mort dans l’incendie.
Matveï Orlov est mort. Bienvenue à Altaïr, le fils caché de ta tante. Tu n’as guère eu de mal à trouver le prénom. Orlov, l’aigle en russe. Altaïr, l’étoile la plus brillante de la constellation de l’Aigle, dont le nom signifie « l’aigle en vol » en arabe. Même si pour l’instant, tu ressembles plus à un oisillon brisé. Altaïr Orlov, fils d’Alevtina. Et qui partage ses idées sur les nés-moldus. Ton don de métamorphomage te permet de modifier ton apparence, de sorte que même tes proches amis ne te reconnaîtraient pas. Tu gardes seulement un air de famille, après tout, Matveï est censé être un proche cousin.
Et à mesure que tu changes, tes sentiments grandissent en force. Rage au ventre, haine dans le cœur, les sentiments violents flambent en toi. Tu tueras ceux qui ont fait ça, tu vengeras les tiens comme il se doit. Tous ces Mangemorts qui tuent sans sourciller… tu les traqueras et tu les auras ; ils ne s’en prendront plus aux innocents. Ta tante recommence à t’entraîner – les réflexes sont toujours là, mais tu as tellement perdu en force… Petit à petit, tu arrives à te reconstruire, à progresser, à recouvrer la plus grande part de ton énergie. Et c’est lorsque tu te perds dans la rage du combat, que tu brises tes barrières dans la lutte, jusqu’à mettre ta tante au sol, lame posée sur la jugulaire que tu te sens enfin vivant. Boosté par l’adrénaline qui court dans tes veines, par la puissance que tu ressens lorsque tu frappes.
Un sourire.
— C’est bien.
Oui, tu te sens à peu près toi-même, même si ça ne referme pas les plaies qui béent en toi, même si la douleur est toujours là, même si le sourire infiniment triste de Nick te retourne le cœur chaque fois que tu le vois, même si tu ne seras plus jamais le même. Mais ton père t’a appris à survivre, et c’est ce que tu vas faire. Pour lui, pour ta mère, pour ta sœur et ton frère.
Ton père a fait de toi une arme, dit ta tante – et elle a raison. Anastasia, toi et Nicholas, trois armes au service de la famille, aussi mortellement doués les uns que les autres, capables d’affronter toutes les situations ou presque. Tu n’as jamais très bien su pourquoi il vous a autant préparés et c’est trop tard pour demander. Craignait-il pour vos vies dès le début ? Et pourtant, toute sa science, tout son entraînement ne lui ont servi à rien, ne l’ont pas empêché de mourir…
Tu profites de ces mois de convalescence dans le plus grand secret pour t’essayer aux potions de ton père malgré ta phobie du feu – tu as dû te résoudre à inventer une sorte de plaque de verre chauffant à installer sous les chaudrons plutôt que d’utiliser de vraies flammes. Même dans les cheminées, tu as du mal à les supporter, hanté par la crainte qu’elles ne se ruent d’un coup sur toi. Même les bougies te mettent mal à l’aise.
Ta tante t’entraîne également à la magie – ta faiblesse ne disparaîtra jamais, mais tu dois arriver à en faire abstraction quand les circonstances l’exigent. Le transplanage te reste interdit, tu te débrouilles avec les Portoloin. Les duels… tu finis trop souvent à genoux, nauséeux, au bord du malaise, une flaque de sang devant toi, lorsque sorts que tu lances et sorts reçus s’entremêlent trop. Et ça empire au fil des entraînements, jusqu’à ce que tu y mettes un terme d'autorité, ça ne sert à rien, ça ne fera que t'affaiblir. Tu utiliseras des armes blanches, tu attaqueras par derrière, tu te débrouilleras pour te mettre le moins possible en danger. Et tant que ça ne dure pas trop longtemps et que tu es assez rapide pour esquiver, tu peux remporter un combat de magie. Alevtina t'apprend également l'occlumencie, essentielle pour protéger ta nouvelle identité.
Peu à peu, tu abandonnes ton ancien "moi" derrière toi. Il ne reste plus grand-chose de l’insouciant Matveï qui s’imaginait la vie comme un immense terrain de jeux. Tu deviens sombre, sauvage, renfermé. Froid avec tout le monde. Travailles le rôle auquel tu te destines : pour trouver les assassins de tes parents, tu dois te mêler à eux. Malgré la peur qui rôde et te retourne les entrailles. Malgré tes compétences, tu crains qu’ils ne te retrouvent et t’achèvent – une crainte irrationnelle, insidieuse, rampante, dont tu peines à te défaire et qui hante jusqu’à tes cauchemars. Une part de toi aurait voulu mourir, une autre le refuse absolument.
Au cours des mois qui suivent, avec ta tante, vous mettez au point tous les détails de ta nouvelle identité. Altaïr Orlov, un sang-pur russe – elle te fait même rencontrer la famille de ton père que tu n’as jamais vue – et c’est un miracle si tout le monde survit. Tu n’en peux plus d’entendre tes grands-parents répéter que ton père et ses enfants n’ont eu que ce qu’ils méritaient, que ta traînée de mère est responsable de tout cela. Ta main se referme sur ta baguette, seul un regard de ta tante t’empêche de tout dévoiler, de leur dire ce que tu penses. Mais non. Altaïr est censé approuver tout cela, sourire devant les insultes, en rajouter.
Ils t’accueillent comme le fils prodigue, le nouvel héritier de la famille. Altaïr qui rejoint sa mère en Angleterre pour relancer l’affaire familiale, renouer avec les potions et les recherches de trésor enfouis.
*
Trop faible encore, tu n’as pas pu participer à la bataille de Poudlard. Qu’à cela ne tienne, tu traqueras les Mangemorts en fuite pour les ramener au Ministère, trouveras les assassins de tes parents.
C’est à ce moment que tu fais la connaissance de celui qui deviendra ton contact au Ministère, un Auror qui traque également les Mangemorts. Il finit par comprendre le double jeu que tu mènes derrière la façade et vous œuvrez ensemble à traquer les partisans en fuite de Voldemort – sans parvenir hélas à tous les attraper.
Les années qui suivent, derrière le cabinet de conseil en archéologie et artefacts magiques de ta tante, tu continues de te mêler à la vie criminelle sorcière tandis que ton contact fait mine de n’en rien connaître. Ton nom n’apparaît dans aucun document du ministère, autrement que dans les papiers de l’immigration. Mais tu rôdes dans les coins mal famés du monde sorcier, entretenant des liens avec des criminels de toutes sortes, à la recherche de la moindre information qui pourrait t’être utile. Tu renoues parfois contact avec certains de tes anciennes connaissances de Poudlard, amies ou ennemies, mais tous ignorent qu'ils t'ont connu autrefois - pour ceux qui t'étaient proches, cela te donne une drôle de sensation, mais tu n'as pas le choix. Si les Mangemorts en fuite apprennent que tu as survécu, nul doute qu'ils te traqueront de nouveau.
Tu as réussi à retrouver un équilibre entre tes traques et ta vie de pilleur de tombes, même si tout cela est officieux, – tu continues les explorations de tes parents, c’est la seule chose qui t’apporte un peu de paix, voyages dans le monde entier.
Jusqu’au jour où tout bascule de nouveau.
Jusqu’en 2005, au moment où Gellert Grindelwald commence à faire parler de lui dans certains cercles.
Les sang-pur russes sont parmi les premiers au courant et ta famille en fait partie, notamment ta tante. C’est elle qui te prévient de la montée du nouveau mage noir. Tu connais assez les idéaux du père pour comprendre ceux du fils. Encore des tarés qui veulent s’en prendre aux nés-moldus et aux moldus en se dissimulant derrière une propagande alléchante au premier abord.
Tu reprends contact avec le Ministère au moment où ton lien là-bas allait faire de même. Au moins, vous êtes sur la même longueur d'onde et, à côté d’un Ministère de la Magie en partie débordé, tu te retrouves avec une nouvelle mission : infiltrer les rangs des disciples de Grindelwald en tant qu’agent double afin de rapporter tout ce que tu apprendras aux Aurors. Ta couverture constituée au fil des années est parfaite : qui pourrait soupçonner qu’Altaïr Orlov n’est pas celui qu’il prétend être ?