Un gosse. Rien qu’innocent, déjà filou, ce fut un gosse qui embarqua dans le Poudlard Express à l’âge de onze an en ce premier septembre. Un gosse qui gravit les marches avec assurance tout en hésitant à chacune d’entre elle, s’arrêtant lorsqu’il eut pénétré dans le wagon pour sourire à ses parents. Un gosse encore qui avança à travers le couloir pour trouver une cabine non pas vide mais emplie d’enfants prêts à l’accepter. Malgré son jeune âge il avait cet aisance à échanger avec des inconnus qu’il conserverait toute sa vie. Des garçons, des poufsouffles, l’accueillirent dans le fracas de leurs rires. Il ne s’installa pas côté gare et ne put pas redire au revoir. Peu lui importait puisqu’il oubliait déjà la tristesse du départ dans les explications que lui faisaient les deuxièmes années qui partageaient ses sièges. Ils mentirent un peu, exagèrent beaucoup, et l’enfant plus jeune tint avec fermeté son bagage comme s’ils avaient pu à la fois le sauver et le précipiter dans ce monde merveilleux.
Dans le futur il se moquerait de ses compagnons de voyage, les malmènerait peut-être même sans méchanceté, mais pour l’heure il ne savait rien des années qui s’étendraient pour lui. Seul le présent comptait - il n’en avait jamais été qu’ainsi - et il était inutile de se projeter. En grandissant cette certitude ne ferait que croître pour empoisonner le poids de l’âge et l’enclavee dans cet état léger. Un adulte qui serait un gosse, éternellement.
Le trajet s’éterniserait mais qu’importe. Il voulait ne pas le voir finir pour ne pas risquer d’être déçu. Pourtant la réalité fut bien supérieure aux attentes qu’ils s’étaient faites. Son jeune esprit impressionnable resta marqué par l’empreinte de ce lieu des plus magiques. Avant de descendre du train, il ne savait encore tout ce qu’il traverserait, ne pouvant qu’essayer de l’imaginer. Mais l’esprit d’aucun nouveau-né ne pouvait deviner ce qu’il vivrait en ce lieu. Huit ans plus tard, je m’en enfuyais en étant toujours un gosse. Un peu moins innocent, un peu plus filou, inapte à descendre sur le quai pour se jeter dans l’existence.