Sage est une femme élancée, élégante, avec une véritable prestance. Le genre de femme qui laisse un parfum épicé et musqué dans son sillage, sans pour autant entêter au point d'écoeurer. Sa peau pâle comme de la porcelaine met en valeur le pourpre de ses lèvres charnues. Il faut dire que cette brune profonde aux yeux gris semble renfermer un tas de secrets, mais son air impassible ne la trahira jamais. Elle a le goût du luxe et des belles choses, et n'apparaîtra jamais en public sans se mettre sur son 31. Prestige du nom oblige...

Sage économise ses mots. Elle ne parle que quand c'est nécessaire et réfléchi. Elle a le verbe piquant, mais toujours calme, même lorsqu'elle s'adresse à ses ennemis avec une pointe de sarcasme bien placé. En toutes circonstances, elle se montre respectueuse envers les gens de sa condition, mais ne partagera pas leur haine des nés-moldus. Pourtant, elle acquiescera toujours poliment: question de convenance. Elle a son succès en société et sait se faire apprécier. Véritable planificatrice événementielle, elle est reconnue pour son statut de fille du grand Richard Austen, homme d'affaires réputé, et un bon nombre d'obligations sociales en découlent. Cette femme de l'ombre doit toujours faire bonne figure, mais à l'intérieur ça cogite. Les nés-moldus? Elle les ignore avec dédain, sauf quand il faut traiter avec eux pour redorer l'image de son nom en public. Là encore, elle se montrera toujours polie par soucis de convenance. Voici son plus grand pari: savoir ménager les deux partis, et garder ses convictions de sang-pur. En a-t-elle vraiment, d'ailleurs?

Au fond, ce qui la dégoûte plus qu'un né-moldu, c'est un sorcier négligé en haillons qui n'accorde aucune importance à son apparence, peu importe sa caste. Celui-là, elle le toisera sans ménagement comme un insecte. Mais ne vous méprenez pas, elle a toujours quelques uns de ses préjugés originels, même si la guerre de 1998 a remis pas mal de choses en question. Cette femme cultivée sait parfaitement penser par elle-même, mais l'ombre de ses ancêtres plane toujours au dessus de sa tête et il n'est pas aisé de se détacher de leur emprise. Elle est simplement coincée dans une posture inconfortable et s'empêche de trop réfléchir par peur de tout compliquer. Cela va-t-il durer?

Sage a reçu une éducation propre au prestige de son ascendance: ferme, exigeante, cultivée, mais aussi dans l'étroitesse d'esprit, la peur de l'Autre, et le sectarisme. Son union avec l'héritier Calden s'est soldée en divorce. Avant que tout parte à vau l'eau dans leur relation, le mariage avait bien évidemment été arrangé dans cette optique d'honneur à perpétrer.

Elle est révoltée par la taxe faramineuse que sa famille subit. Pour elle, c'est une injustice discriminatoire, un comble venant de ceux qui ont crié à la discrimination en premier lieu. Sa fortune, elle y tient! Du reste, elle a toujours gardé certains préjugés étriqués comme un héritage inévitable à assurer, mais elle a toutefois su prendre de la distance avec l'animosité acharnée de ses aînés. Elle ne souhaiterait pas la mort d'un né-moldu, mais elle n'irait pas lui parler non plus, à moins d'y être forcée pour son image. En temps normal, elle détournerait simplement le regard. C'est aussi lié à sa caste. Elle a tendance à côtoyer les gens de sa condition par habitude, par sécurité, et face à un extrémiste radical elle ne dira rien, ne s'opposera pas, mais ne partagera pas son élan incisif pour autant. Ce n'est pas une révolutionnaire ni une collabo: c'est une sorcière passive, victime de sa condition qui laisse les choses se faire par facilité, et par paralysie sociale.

Les faux-semblants et la dignité sont un masque pour cette femme qui se conforme par le mutisme. C'est d'ailleurs l'essence même de son caractère, puisqu'elle y est forcée en paradant dans des événements mondains, des réunions visant à rassembler une aristocratie déchue qui ne se retrouve plus dans cette société. Au fond, une dualité l'assaille. Elle joue le jeu, prend son rôle au sérieux, mais elle ne se retrouve plus dans l'agressivité de ses pairs, ni dans leur haine. D'un autre côté, elle ne se retrouve plus dans cette société qui favorise les nés-moldus non plus. Sage ne sait plus où est sa place, ni qui elle est, mais elle ne dit rien. Elle observe de loin, se montre digne, et respecte son planning avec assurance... Cela changera-t-il un jour ?